please take me home - edward

Ça y était. Elle pouvait enfin sortir de cet endroit. Après seulement deux semaines, on lui rend sa liberté. Elle ne sait pas comment elle a su trouver la force de feindre des sourires, des blagues. Elle ne sait pas comment elle a réussi à feindre que tout allait bien, qu'elle allait se remettre. Elle avait l'impression que son visage était craquelé, fatigué d'avoir autant jouer la comédie. Ces réunions, ce psychologue. Son père en avait tuer une psychologue, elle se permettait de comprendre pourquoi. Elle n'aimait pas qu'on fouille, qu'on pose de question, surtout parce qu'elle n'avait pas de réponse. Là où aurait dû se trouver un ressenti, un sentiment, se trouvait un immense trou noir. Le vide. "Mademoiselle Hurst..." Elle serre les dents. Elle devrait penser à changer de nom, prendre celui de sa mère. Elle ne se retourne pas lorsque l'infirmière s'adresse à elle. Son regard se contente de fixer la lueur des lampadaires à l'extérieur. "Qui vient vous chercher?" Encore une question en suspend. Elle ne se retourne toujours pas. Il y avait toujours ce vide de réponse. Puis, sans trop réfléchir, elle donne un numéro de téléphone. Le seul dont elle se souvient ; celui d'Edward.

Elle entend l'infirmière composer le numéro et s'approcher d'elle pour lui tendre le combiné. La sonnerie du téléphone la fige ; elle devra encore parler...Lui parler. Elle a l'impression d'attendre une éternité. Et si il refusait, pouvait-elle rester là? Finiraient-ils par la jeter à la rue? Mais quelqu'un répond. C'est sa voix. Elle a l'impression que tout s'écroule à l'intérieur d'elle tandis qu'elle reste quelques secondes sans rien pouvoir prononcer. Lorsqu'il essai de comprendre si quelqu'un se trouve au bout du fil, sa voix se craquelle lorsqu'elle lui annonce qu'il ne s'agit que d'elle. "Edward...Peux-tu venir me chercher s'il te plaît?" Elle s'attend à ce qu'il refuse. Elle ne lui a jamais répondu. Elle est disparue sans même pouvoir lui donner une réponse. Mais c'était si lointain. C'était une autre vie. Et pourtant, c'Est de son numéro qu'elle s'est souvenue. "Sinon je prendrai un taxi. Ce n'est pas grave." Elle n'a pas d'argent pour le taxi, certes. Mais elle trouverait bien un moyen de rentrer. Mais rentrer où? Sa maison lui appartenait-elle encore après des mois d'absence? Que retrouverait-elle là-bas? Une chambre vide...Un père absent, une sœur démolie... Mais on l'avait prévenue ; pour récupérer sa fille, elle devait être stable. Retourner travailler, vivre comme si de rien était...

Il avait longtemps hésité, Edward, à décrocher. C’était comme s’il y avait eu une augmentation fulgurante de numéros inconnus qui l’appelaient, des messages enregistrés pour la plupart, ou encore des appels vides, personne au bout du fil, et il en avait assez. Alors s’il ne reconnaissait pas le numéro qui s’affichait à son écran, il refusait de répondre. Pourtant, cet appel là n’indiquait pas simplement un numéro provenant d’un autre pays. Non, c’en était un local et l’indication qu’il s’agissait d’un numéro confidentiel l’avait assez titiller pour qu’il daigne finalement répondre. Allo? Aucune réponse. Il ne put s’empêcher de rouler les yeux en imaginant que c’était encore un de ces appels frauduleux. Allo? Demanda-t-il  nouveau, visiblement agacé et très peu patient. Sa journée s’annonçait chargée et il ne voulait pas être retardé outre mesure à cause de stupidités du genre. Il allait raccrocher lorsqu’il entendit sa voix au bout du fil. Pendant un instant, il cru que son cœur allait flancher. Des mois qu’il ne l’avait pas entendue. Il l’avait espérée si longtemps et, s’il était honnête, son espoir faiblissait un peu plus chaque jour, mais la flamme ne semblait jamais vouloir s’éteindre quand bien même on lui disait qu’il valait sans doute mieux passer à autre chose. Voilà que le temps lui avait donné raison. Edward Aucun mot n’était assez puissant pour décrire l’émotion qui l’envahi lorsqu’il l’entendit prononcer son nom. C’était pourtant si simple, mais vu les circonstances, c’était énorme. Peux-tu venir me chercher s'il te plaît? Tout dans son horaire aurait du l’inciter à lui dire qu’il n’était pas en mesure de le faire. Sinon je prendrai un taxi. Ce n'est pas grave. Il aurait sans doute du s’excuser et lui expliquer qu’il avait une journée chargée, mais il n’en fut pas capable. Il avait attendu ce moment depuis ce qui lui semblait être une éternité, le reste pouvait bien attendre. Après tout, les gens avec qui il collaborait étaient compétents et il leur faisait absolument confiance. Il était certain qu’ils pourraient se débrouiller sans lui pour quelques heures. Il secoua donc la tête, comme si elle pouvait le voir – ridicule, avant de lui dire, Non, j’arrive dès que possible. le téléphone coincé entre son épaule et sa joue tandis qu’il enfilait une veste, avant de s’emparer de ses clés et de son porte-monnaie. Il quitta son logement, verrouilla derrière lui et embarqua dans sa voiture en direction de Denver, prenant soin d'avertir ses collègues qu'il arriverait sans doute plus tard, s'il se pointait au boulot, leur donnant les directives pour la journée. Les doigts tapant le volant trahissant une nervosité certaine, il maudit le peu de trafic qu’il rencontra en cours de route, retardant son arrivée à destination. Un sourire se dessina sur son visage lorsqu’il la vit là, l’attendant. Il se gara avant d’aller à sa rencontre. Hey. Lâcha-t-il, ne sachant pas trop quoi dire ni quoi faire. Il mourrait d’envie de la prendre dans ses bras, mais il avait l’impression que ce n’était peut-être pas la chose à faire, comme si un fossé s’était créé entre eux sans qu’il n’y ait réellement de responsable autre que le temps, sans qu’il ne l’ait voulu non plus. Et puis, il ne savait pas non plus les effets que les évènements des derniers mois avaient eu sur elle et il craignait trop de faire un faux mouvement, quelque chose qui lui déplaise pour oser faire quoi que ce soit.